
Ce verset existe, effectivement. Mais pas comme il a été présenté. On y a tronqué un passage important. Allah dit exactement ceci : «Quiconque tue un seul être humain, non convaincu de meurtre [la précision est de taille !], ou de sédition sur la Terre, est considéré comme le meurtrier de l’humanité tout entière. Quiconque sauve la vie d'un seul être humain est considéré comme ayant sauvé la vie de l’humanité tout entière !». C’est la Sourate 5, Al-Maidah (La Table servie), verset 32, du Saint-Coran. Le texte est clair comme de l’eau de roche. Dieu s’oppose certes à l’anéantissement de tout individu, mais il s’est empressé de d’ajouter "non convaincu de meurtre". C’est cette condition que les conférenciers ont omis, en restituant le verset coranique. Dans un autre passage du même Livre Saint, le Seigneur est encore plus explicite, en disant ceci : "Ne tuez pas la vie qu'Allah a rendue sacrée, si ce n'est de plein droit" ». Sourate 17, Al Isra (Le Voyage nocturne), verset 33.
L’Islam est très respectueuse de la dignité et de la vie humaine. C’est ce qui explique que même à l’issue des "Jihad", le Prophète insistait pour que les droits des prisonniers de guerre soient scrupuleusement respectés. Il arrivait même qu’il aille personnellement s’enquérir de leurs conditions de détention, allant jusqu’à vérifier s’ils avaient mangé et bu à leur faim. Plusieurs exemples de ce type de sacralisation des droits de l’homme peuvent être trouvés dans la vie et les traditions du Prophète. C’est incontestable, l'Islam rejette toutes formes de violence injustifiée. Allah, le Tout-Puissant dit : «Entraidez-vous dans la droiture et dans la piété, mais ne vous aidez pas mutuellement dans le péché et la transgression» (toujours dans Al-Maidah, verset 2). Autrement dit, l’Islam tout en sacralisant la vie humaine, reste intraitable contre ceux qui n’ont aucun respect pour la vie humaine ! Le Créateur s’en est amplement expliqué dans la sourate de La Vache, verset 179, en disant : "C'est dans la Loi du Talion que vous aurez la préservation de la vie, ô vous doués d'intelligence, ainsi atteindrez-vous la piété".
Pour ou contre l'abolition de la peine de mort ?
Je ne saurais avoir d’opinion personnelle à ce sujet, car ma petite personne est trop insignifiante par rapport à ce que les Textes sacrés ont décrété depuis la nuit des temps. En tant que croyants, musulmans pratiquants, imams de mosquée de surcroît, le Saint Coran et les Haddits du Prophète (psl) sont nos références, nos guides par rapport à toutes les questions qui se posent à notre conscience d’êtres mortels, en transit ici-bas. Dieu sait, mieux que nous-mêmes, ce qui est meilleur pour Ses créatures. Nous rendons grâce à Dieu de nous avoir donné la foi. C’est à travers le prisme de sa foi que le croyant appréhende toute la problématique de cette vie terrestre ainsi que celle de l’Au-delà. Mon opinion ne saurait donc qu’épouser strictement la position de la dernière religion révélée, qu’est la nôtre.
L'islam est une religion humaniste, mais qui tient cependant à faire respecter la vie. Toutefois, il est bon de préciser que la peine capitale, qu'évoquent le Coran et la Sunna du Prophète (psl), n'a absolument rien à voir avec celle qui avait cours (avant son abolition par la Gauche révolutionnaire et les intégristes laïques), dans certains pays européens, ou présentement dans certains districts des Etats-Unis. En effet, en Islam, l’application de la peine de mort n’est pas systématique. D'après les exégèses de nombreux Oulémas (docteurs en droit islamique) de renom, la peine capitale est INAPPLICABLE au meurtrier si une seule des quatre conditions suivantes n’est pas réunie :
1) Que la famille de la victime réclame l'application de la peine capitale ;
2) Qu'il y ait des preuves irréfutables de la culpabilité du meurtrier;
3) Qu'il soit établi qu'il y avait réellement l’intention de tuer ;
4) Qu'il n'y ait aucune circonstance atténuante.
Notons que la présence de circonstances atténuantes (légitime défense, homicide involontaire, etc.) rend automatiquement caduque toute application de la peine capitale, même si les trois autres conditions, prévues par le Droit islamique, sont effectivement présentes. En effet, de nombreuses exceptions de nullités – qu’il serait fastidieux d’évoquer ici - sont pris en pris en compte par le Droit musulman, conformément à une jurisprudence islamique très ancienne qui dit que : "Les peines et le Talion sont caduques dès lors qu'un doute subsiste". L'accusé profite alors du bénéfice du doute, qui rend incontournable le recours à la "diya" (les dommages et intérêts).
Bien avant d’être imité par le Droit positif occidental, le Droit islamique a toujours prévu des voies de recours ou de compensation. Par exemple, le meurtrier peut se racheter en payant une "diya" à la famille de la victime. Si la famille ne réclame rien, le juge peut commuer la sanction en une peine d’emprisonnement. Le Coran en fait état dans la sourate de La Vache, verset 178 : "Celui à qui son frère aura pardonné quelque chose, alors (on lui fera) une requête convenable [le paiement du dédommagement], et (il s'en) acquittera de bonne grâce. Ceci est un allègement et une miséricorde de la part de votre Seigneur". Le Prophète Mouhamed (psl) apporte d’avantage de clarté à ce sujet, dans un de ses enseignements, rapporté par Abou Daoud : "Celui dont (un proche) a été tué, ou celui qui a été blessé, a le choix entre trois possibilités : demander la Loi du Talion, prendre le dédommagement financier (diya) ou pardonner".
En tout état de cause, l'Islam recommande à la famille de la victime de privilégier le pardon, plutôt que la demande d’application de la Loi du Talion. Un enseignement, rapporté par Abu Daoud indique que : "chaque fois qu’il était soumis au Prophète Mouhamed (psl) un cas où la Loi du Talion était applicable, il recommandait (aux proches de la victime de choisir) le pardon".
Voilà ce que dit le droit islamique. Autrement dit, contrairement à ce que les détracteurs de l’Islam théorisent, l’application de la peine de mort n’est pas systématique et aveugle en Islam, qui est une religion humaniste, profondément respectueuse de la vie humaine.
Imam Massamba DIOP
Président exécutif de l’Organisation
Islamique JAMRA
0 Commentaires
Participer à la Discussion