BECAYE MBAYE EN GRAND FORMAT : «IL N'Y A PAS DE BLANCHIMENT D'ARGENT DANS L’ARÈNE , LES PROMOTEURS ONT DE GRANDS SPONSORS»

 

J’étais un enfant terrible, turbulent. J’ai grandi avec mes parents à Grand Dakar. J’ai des frères et sœurs, mais Dieu a fait que j’ai acheté la maison suite au décès de nos parents. Je l’ai reconstruite car c’était une maison modeste. J’ai reçu une bonne éducation car vivre à grand Dakar était trop difficile, c’était un quartier très exposé au banditisme. J’ai étudié mais j’ai arrêté en classe de cm2, la classe des « Guéwels » (Rires). J’ai été tailleur au marché Nguélaw c’est après que j’ai décidé d’émigrer en France en 1982. J’ai passé 10 ans là bas tout en poursuivant mon métier de tailleur par la suite je suis rentré au pays. Mon retour n’a pas été du tout facile du fait que je n’avais rien alors que j’étais marié et père de deux enfants. Cependant, je me suis battu avec ma femme pour nous en sortir. Par la force des choses, je me suis trouvé à la radio Walfadjiri, grâce au journaliste Mame Less Camara en 1997. J’ai assisté à la première réunion de rédaction avec les Mame Marie Faye Aziz Ndiaye, Mamadou Ibra Kane… J’animais une émission traditionnelle « Lamb Ji », j’aime le sport et d’ailleurs je m’y connais mieux en football qu’en lutte. J’ai débuté à Walf comme prestataire, mon premier salaire était de 75000 FCF. A Walf, on avait confiance en moi. Comme j’avais quelques notions de la lutte, on m’invitait souvent à débattre à la télé. Ce qui ne plaisait pas à mon patron. A cause de ce conflit, j’ai choisi d’aller à la 2Stv. 

 

 

 

C’était un défi pour moi. Je me suis dit que j’allais faire quelque chose pour changer la lutte et la faire aimer aux gens par l’intermédiaire de Bantamba (Ndlr : l’émission qu’il présente à la 2stv). Cela correspondait à la période où Tyson avait quitté l’arène et si ce n’était pas l’émission Bantamba personne n’allait suivre la lutte à la télé. Car, Tyson était une grande star à l’époque et avec sa suspension par la CNG, il y’aurait forcément eu un vide dans l’arène. Avant, il n’y avait qu’une seule émission de sports et c’était à la RTS avec « Sport de chez nous». Par la suite, les autres chaines de télévision ont commencé à diffuser des émissions de lutte. Mais, c’est moi qui ai fait de la lutte ce qu’elle est aujourd’hui grâce à mon émission. On a beaucoup innové parce qu’on allait filmer les entrainements des écoles pour faire découvrir au gens ce qui se passaient réellement dans l’arène (aller voir le lutteur chez lui, connaitre tout de lui, ses biens, sa vie etc.) Une chose qui a motivé pleins de jeunes à devenir lutteurs. Il y avait que l’école de lutte de Fass et celle Balla Gaye, tout le reste est venu après. Aujourd’hui beaucoup de jeunes abandonnent l’école à cause de la lutte, je trouve que c’est malheureux, c’est négatif d’une part parce que ce n’était pas le but rechercher par mon émission. En sus, il arrivera sous peu où tout le monde cessera de suivre la lutte à la télé parce qu’il ya beaucoup d’émissions de « Lamb », ça commence à saturer. Ce qui me déplait le plus c’est que certains font des émissions anti « Lamb » dans les reportages. Pour une bonne émission, il faut une connaissance du milieu, l’historique, et avoir de bonnes techniques de communication, très souvent certains communicateurs passent à coté et c’est dommage. 

 

 

On confond les «Guéwels » et les journalistes. Je n’ai pas appris le journalisme, mais je maitrise bien mes sujets et j’ai fait le journal, la revue de presse, une émission politique, parce que j’ai été formé sur le tas. 

 

 

On a une association de reporters griots. Si on n’est pas « Guéwels » on n’en fait pas partie, et si on n’est pas reporter même étant griot on en fait pas partie. Le but de cette association n’est rien d’autre que de participer à la bonne marche de la société. Les griots ont toujours eu un rôle d’intermédiaire que ça soit sur le plan religieux, politique ou autre chose. 

 

 

Nous intervenons dans tous les milieux lorsqu’il y a conflit mais il y a certaines choses que je ne peux pas dire. On ne les divulgue pas. 

 

 

C’est normal que les lutteurs aient une association où ils pourront se regrouper pour échanger et dénoncer certaines pratiques, comme les travailleurs ont des syndicats. Mais, ils ne doivent pas aussi parler n’importe où et n’importe comment. Ils doivent demander une audience au CNG et discuter en privé. Le CNG ne doit pas prendre en mal les propos des lutteurs, il doit être plus ouvert. Il ne faut pas qu’il croit que telle ou telle personne est contre lui. Au Sénégal, on a l’impression qu’on ne doit pas critiquer mais juste subir et croiser les bras. Il faut que le CNG fasse attention, c’est vrai, il y a des choses qu’il ne doit accepter des lutteurs mais aussi d’autres qu’il doit accepter. 

 

 

Est-ce que Boy Kayré sait ce que veut dire mafia ? Au Sénégal, les gens ont une mauvaise habitude d’employer des mots dont ils ignorent même le sens dans le dictionnaire. Le CNG ne doit pas prendre cela dans son vrai sens, car Kaïré est loin de là ! 

 

 

La lutte c’est aussi de l’art, je ne suis pas d’accord avec une suppression de cet art. D’un autre côté, les lutteurs ne doivent pas exagérer quand on leur dit de limiter leur bain mystique à 5 minutes. Il faut qu’ils acceptent, parce que si on leur donne beaucoup de temps rien que pour cette partie les combats pourront aller jusqu’à minuit. Imaginer qu’un lutteur apporte plus de quarante bouteilles, mais comment va-t-on s’en sortir, dans ce cas je suis tout à fait d’accord avec le CNG. Je ne dis pas qu’il faut arrêter d’apporter des bouteilles de 10 litres, mais il faut que les lutteurs en apportent moins, peut être une ou deux par personne. Pour ce qui est des bouteilles d’un litre et demi, ce n’est que de la poubelle, ça fait beaucoup de saleté dans les stades. Cela est aussi à voir. Le CNG doit voir ce qui est bien pour la lutte et ce qui ne l’est pas et appliquer en conséquence. Et puis, je pense que les sanctions que subissent les lutteurs sur leur cachet sont exagérées. Par exemple, Elton, il a été battu et il est resté une semaine sans voir en plus de cela on lui a coupé 800.000 FCFA. Et, puis Gouy-Gui aussi rien que pour ces «Diatt » (litanies), on lui a coupé 500.000 FCFA. Avec le combat Emeu Sène-Gris Bordeaux, les deux lutteurs ont perdu chacun plus de deux millions de FCFA alors qu’ils ont fait un beau combat. Je trouve que tout ça est injuste. 

 

 

C’est possible qu’il l’ait dit pour cela, en tout cas la Mafia c’est trop dire et c’est grave. Le problème, c’est que le CNG est trop fermé. Il y a des membres dans le comité directeur qui ne participe même pas à leur réunion. Normarlement, le comité olympique et les lutteurs en activité devraient y avoir leurs représentants. Mais comment les anciens lutteurs peuvent y avoir leurs représentants en la personne de Manga II et de Moustapha Gueye alors que ceux qui sont les plus concernés n’en ont pas. Si les lutteurs en activité étaient associés au CNG, ils ne seraient pas dehors à raconter ce qu’ils veulent, ils n’ont pas le choix. 

 

 

J’en entends parler. Dans ce pays, on dit qu’il y a du blanchiment d’argent partout ce n’est pas seulement dans la lutte. 

 

 

Ce sont les sponsors qui donnent l’argent et en plus la majorité des promoteurs sont des hommes d’affaires. Luc Nicolaï par exemple c’est un homme d’affaire, il a des partenaires. En tout cas moi, j’en sais pas grande chose. Les gens disent qu’il y a de l’argent sale patati et patata. Mais est ce qu’au fond il peut y avoir du blanchiment d’argent ? Les promoteurs ont de grands sponsors donc je ne vois pas pourquoi ils vont faire du blanchiment. 

 

 

La lutte n’a pas le monopole de la violence, elle est présente partout au Sénégal. Combien d’hommes politiques a-t-on frappé ici, combien on a tué? Combien de cas de viol d’enfants y a-t-il ? La racine de la violence n’est pas dans les stades. Ce sont les gens qui viennent au stade avec leurs angoisses, leurs stress et leurs désespoirs. En plus, la majeure partie sont des jeunes chômeurs ou issus de milieux défavorisés, ils viennent donc se défouler lors de matchs de Navetane ou des combats de lutte. Ils tentent de refouler cela mais dès qu’on les touche, dés qu’il y a une petite querelle tout cela ressort. Avant, les jeunes se battaient sans se tuer mais maintenant la mort est devenue banale, ce n’est pas le sport qui en est la cause mais le désespoir. 

 

 

Cette était un rêve pour moi. C’est lorsque j’étais à Walfadjri que ça m’est venu, je le disais même à l’antenne. Et j’y ai cru donc je me suis battu et j’ai fais des économies. La radio devait s’appeler « Guéwel-gui Fm », c’est grâce à une fille que j’ai changé le nom. Un jour elle m’a trouvé chez un marabout alors que je souhaitais avoir une radio, la jeune fille m’a proposé de l’appeler Sénégal car, disait-elle : « Au Sénégal, tout le monde aime Bécaye Mbaye ». Depuis lors, la radio est bien écoutée. Cependant, on n’a pas d’argent car la radio n’a pas de publicité ni de sponsor. Alors que c’est une chaine d’informations générales. J’ai recruté près de 30 employés. Aussi, FM Sénégal se trouve à mon domicile pour n’avoir pas à payer un loyer cher. Mais, mon ambition c’est d’avoir un jour ma propre télévision et pourquoi pas un quotidien. Je suis ambitieux. D’ailleurs, je vais aller voir le président de la République pour lui faire part de mes intensions à propos de la télévision, s’il me reçoit ces temps ci. Je veux participer au développement de mon pays. D’ailleurs, on va même faire le lancement de la radio le 10 décembre 2011 à Grand Dakar. Je vais faire une grande manifestation culturelle avec de grands hommes de la presse, les artistes etc. 

 

 

 

Moi, j’en ai eu une expérience (Rires). L’année passé, on m’avait fait une bonne proposition pour intégrer la TFM. Mais, je n’ai pas accepté. El hadji Ndiaye ne m’a rien fait pour que je puisse quitter sa boîte. Néanmoins, ils ont pris 4 membres de l’équipe de Bamtamba. Finalement, j’ai réussi à récupérer le monteur qui était le noyau de l’émission. C’est pourquoi, on ne remarque pas un quelconque changement. Bamtamba, c’est Bécaye Mbaye et personne n’y peut rien. Les autres chaînes de télévision ne font que nous copier et cela fait plaisir. Toutefois, que les patrons de presse ne viennent pas faire du mercato dans ma radio, sinon ils auront affaire à moi. Puisque, je ne l’ai pas fait quand j’ai ouvert Fm Sénégal. J’ai pris de nouvelles personnes comme Bour Guewels, Soda Bousso, etc. pour leur donner l’occasion de montrer leurs talents. Ainsi, je déplore ce qui s’est passé entre Youssou Ndour et Bougane Gueye Dani. Ce dernier doit prendre le problème avec philosophie au lieu de traiter Youssou Ndour de lâche. J’ai été surpris en entendant ces propos venant de lui. Chacun doit penser à son futur. 

 

 

La guerre entre les promoteurs date de longtemps. L’année dernière Gaston a attendu que Luc Nicolaï aille en congé en Europe pour ficeler tous les grands combats. Cette année, Gaston après le combat de Balla Gaye contre Tyson, est allé dans les médias pour parler. Pendant ce temps Luc Nicolaï a pris toutes les grandes affiches. Mais, comme Gaston a des astuces, il a essayé de contrecarrer Luc Nicolaï ce qu’il a bien réussi. C’est du business c’est toujours comme ça. Que Luc Nicolaï détienne le gros lot avec le combat entre Yékini- Balla Gaye II, cela ne plaît pas à Gaston. Ce qui est arrivé à Luc l’année dernière si c’était Gaston, il n’allait jamais l’accepter, parce que la lutte c’est sa vie il n’a que cela alors que Luc à d’autres occupations comme ses hôtels. 

 

 

Par rapport au combat entre Balla Gaye et Yékini, c’est l’expérience et la jeunesse et chacun peut remporter la victoire. En outre, Yékini est resté jusque-là invincible. Tous les deux ont tout ce qu’il y a pour être un bon lutteur. La question que l’on devrait se poser est la suivante : Est-ce que la fougue de Balla Gaye peut ébranler Yékini ? J’implore les supporters et autres de ne pas en faire un combat d’ethnie. C’est ce qui est à l’origine de beaucoup de conflits. 

 

 

 

J’ai signé la polygamie, mais je reste monogame. Je ne suis pas un homme à deux épouses. Avec tout ce que j’ai comme travail, si je dois en ajouter une autre femme, j’aurais de sérieux de problèmes. Je n’ai besoin que d’une seule femme pour me sentir équilibré. De plus je ne veux pas d’une famille déstabilisée avec des enfants de gauche à droite, je ne veux pas que ma famille soit disloquée à cause de querelles de ménage. 

 

 

Oui, les filles et les « Driankés » (Ndlr : femmes mûres). Les femmes m’appellent tout le temps au téléphone. Parfois, elles m’appellent alors que je suis avec ma femme. Cette dernière ne fait que sourire tout en me disant « Bayil Gni » (Laisses ces femmes). Elle n’a pas à être jalouse puisqu’elle a confiance en elle. Ce dont je suis sûr c’est qu’elle peut dormir tranquillement. Bécaye Mbaye à sa femme : «Soula nékhé gua bondé» 

 

 

Oui c’est mon fils. Il étudie pourtant. Je n’étais même pas au courant qu’il allait jouer dans ce sketch. C’est mon fils qui travaille à la 2STV qui m’en a informé. C’est petit Gris, il ressemble beaucoup à Gris Bordeaux qui est son idole. J’ai un autre fils qui travaille à 2Stv, Mamadou Mbaye. Il réalise la majeure partie des émissions de Bamtamba. Dès fois, si je suis fatigué, je reste à la maison et il va en reportage avec le caméraman pour faire les interviews mais je ne suis pas sûr qu’il continue à faire ce travail. Il se peut que je l’oriente dans d’autres domaines. J’ai aussi un autre fils qui est monteur à la 2STV 

 

 

Je ne suis pas riche (Rires). C’est mon ami Massata Diack qui a équipé tout mon salon (Ndlr : un salon luxueux en cuir et en marbre). La voiture 4x4 que je possède c’est El hadji Ndiaye qui me l’a donnée. 

 

 

Damay bain ! (Ndlr : Se laver avec des potions mystiques) Depuis que j’ai commencé à utiliser cette expression, tout le monde l’a reprise. Les gens sont des complexés. Chacun de nous se protège grâce aux bains mystiques. Dans ma radio l’émission qui a le plus de succès est celle de la voyance en directe. Le serveur vocal explose pendant la durée de l’émission. Je suis un africain et je crois au mystique. Dès fois, en allant au stade je sens qu’on m’a jeté un mauvais sort. Aussi, je ne vais jamais dans un combat de lutte sans me protéger car des gens n’hésiterons pas à me marabouter. 

 

 

C’est celui de Birahim Ndiaye contre Ambroise Sarr ! 

 

 

J’aime bien Gouy-gui, c’est un gentleman. Bien que faisant le fou, il est le plus sain d’esprit de toute l’arène. Mais, il n’est pas mon préféré et je n’en ai pas. Car j’apprécie tout le monde de manière différente. Et un autre dont j’ignore son nom. Il y a de cela deux ans, au stade Iba Mar Diop, ce lutteur avait battu son adversaire et l’arbitre l’a déclaré vaincu depuis lors je ne l’ai plus revu. Il a eu une réaction noble qui m’a marquée. Je l’aime bien aussi.