
Le président Wade tient-il en estime son opposition ? La question est pertinente eu égard aux différents actes, aussi contradictoires les uns que les autres, qu'il pose en direction de celle-ci. De retour d'un séjour parisien, le 21 février dernier, il avait brocardé l'opposition, l'accusant d'être, en intelligence avec des forces occultes étrangères, derrière les violentes manifestations des étudiants de l'Université de Dakar survenues quatre jours auparavant. L'opposition, ainsi visée, avait répliqué à la mesure de l'attaque.
Mais, à peine les ardeurs se sont-elles émoussées des deux côtés que le chef de l'Etat revient, comme si de rien n'était, pour réitérer à l'endroit de l'opposition son appel au dialogue. Dans une lettre en date du 3 mars dernier (voir par ailleurs), il a saisi les partis de l'opposition dans ce sens. En y mettant les formes. Le ton solennel, respectueux, lénifiant à la limite, le président Wade propose à l'opposition une date (mercredi 15 mars), un lieu (le palais de la République) et une heure (17 h) tout en laissant ces propositions à la convenance de cette dernière. Cerise sur le gâteau : cette fois-ci, pour ne pas tomber dans les travers de l'exclusivisme, la même correspondance a été adressée aux secrétaires généraux du Cpc, du G10, de la Ld/Mpt mais aussi aux partis "non-alignés". Le président Wade a dû tirer la leçon de l'omission de la Ld/Mpt quand elle avait saisi, par correspondances épistolaires, les partis de l'opposition dans le sillage de son appel au dialogue lancé dans son traditionnel message à la nation. Le Cpc et le G10 avaient refusé de répondre à cet appel en exigeant, dans un élan de solidarité, que la Ld/Mpt soit saisie au même titre que les autres partis. Le président Wade reculera, par la suite, pour accéder à la demande de l'opposition.
On croyait alors, après cet épisode, que la raison avait prévalu sur les velléités guerrières de l'opposition comme du pouvoir et que les chemins du dialogue étaient définitivement dégagés. Mais, c'est mal connaître Me Wade qui se plaît à suprendre son monde. A la surprise générale, il trainera dans la boue l'opposition, l'accusant d'être perfide et irresponsable, à la suite des fâcheux événements à l'université de Dakar. Après cette sortie, ils sont nombreux ceux qui croyaient que le président Wade avait, volontairement, refermé les portes du dialogue. Surtout après qu'il eut jeté aux orties le comité paritaire chargé de se pencher sur le processus électoral en décidant de manière unilatérale de proroger le mandat des députés. Jusqu'au moment où il décide de relancer, par cette lettre du 3 mars, l'opposition. Tel un marionnettiste, le président Wade fait ainsi prendre à celle-ci la posture qu'il veut.
Mais, l'opposition acceptera-t-elle d'être, continuellement, un jouet entre les mains du président Wade ? En tout cas, de la réponse de ses membres dépendra pour beaucoup son unité. Il ne serait pas surprenant, en effet, de voir des partis de l'opposition accorder une fin de non-revecoir à l'appel de Me Wade. Mais, avant même cette main tendue du chef de l'Etat, certains partis avaient déclaré que la sortie virulente du président Wade contre l'opposition n'était pas un prétexte pour bouder son appel au dialogue. C'est le cas de l'Afp dont le secrétaire général, Moustapha Niasse, de retour d'un long séjour à l'étranger, a laissé entendre que son parti ne rechignerait pas à aller discuter avec le chef de l'Etat.
La prochaine réunion du groupe composé par le Cpc, le G10 et la Ld/Mpt, prévue jeudi prochain chez Amath Dansokho, sera donc déterminante.
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