
Deux hommes ont été condamnés lundi à cinq et trois ans de prison par le tribunal correctionnel de Lyon pour avoir agressé un Sénégalais qui ne respectait pas le ramadan.
Le parquet avait demandé six ans de prison, les faits étant selon lui aggravés car commis en réunion et motivés par "une appartenance supposée à une religion".
"On a estimé qu'il était musulman et que c'était un mauvais musulman", a dit le procureur Nicolas Hennebelle. "C'est une violation flagrante des fondements de la République."
Idriss Zamor, 25 ans, a été condamné à cinq ans de prison et son complice, Abderrezac Khaled, 26 ans, a écopé de trois ans.
Le 13 août 2010, Amara Diarra, 45 ans, était dans un restaurant du centre-ville de Lyon quand il a été pris à partie par un jeune qui lui a reproché de fumer en plein ramadan et demandé au serveur de ne pas lui servir de café.
L'altercation a dégénéré sur la terrasse, où le Sénégalais s'est heurté à un groupe d'une dizaine de personnes.
Il a reçu des coups, s'est cogné la tête sur le trottoir et ses agresseurs l'ont laissé pour mort.
Dans le coma pendant des semaines, Amara Diarra en est ressorti profondément diminué.
"Il n'a plus toute sa tête, il ne reconnait pas les gens, il ne se souvient plus de ce qui s'est passé, il ne peut plus rien faire de sa vie", a dit à la barre le frère de la victime, dans l'incapacité d'assister à l'audience.
Des écoutes téléphoniques mises en place dans le cadre d'une enquête pour trafic de stupéfiants ont permis de confondre Idriss Zamor, un petit délinquant plusieurs fois condamné pour vols.
Il a ensuite été reconnu par des témoins. En garde a vue, il a dénoncé Khaled Abderrezac, qui aurait jeté une chaise sur la victime.
"J'attends depuis deux ans qu'on me démontre que c'est Idriss Zamor qui a fait ça", a plaidé son avocat David Metaxas.
Le prévenu reconnaît avoir été présent mais limite son intervention à une gifle.
"Il n'a pas porté le coup fatal à la victime, ce n'est pas lui qui a porté les coups de pieds à la tête", a dit l'avocat, repoussant le motif religieux de l'altercation.
"On le présente comme l'ayatollah de la place du Pont, le Barbès lyonnais, comme celui qui veille au respect de la pratique du ramadan, mais quelques instants auparavant, il était en train de manger une pizza, le mobile religieux est un prétexte pour l'accusation."
Le prévenu a quant à lui déclaré : "Je suis un nounours, je suis gentil malgré les apparences, je ne suis pas quelqu'un d'agressif. Si je suis intervenu, c'est pour calmer l'altercation."
Catherine Lagrange, édité par Jean-Baptiste Vey
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