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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Politique

Wade entre concession et provocation

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Wade entre concession et provocation

La vraie-fausse politique de main-tendue de Wade. Dans son premier discours depuis les émeutes des 23 et 27 juin dernier, le président sénégalais Abdoulaye Wade a concédé quelques faux-pas de la part de son gouvernement, tout en rejetant toute erreur de fond, en réaffirmant sa légitimité et en mettant en garde les agitateurs. Dans l’espoir d’apaiser les tensions –ou par pure provocation selon le quotidien sénégalais «Walf Fadjiri»- le chef de l’Etat a notamment proposé d’avancer le scrutin présidentiel, normalement prévu en février prochain. «Si l'opposition est pressée et si elle est certaine de détenir la majorité, je peux envisager une élection présidentielle anticipée, si cela est nécessaire pour la cohésion sociale et la concorde nationale», a-t-il déclaré jeudi soir devant des membres du gouvernement et autres élus. «Si l'opposition le veut, dans 40 jours, nous pouvons faire des élections présidentielles», a-t-il ajouté depuis une tente plantée dans les jardins de l’hôtel des Almadies. «Si à l'issue d'une élection anticipée ou à la date normale, le peuple décide de confier le pouvoir à un autre que moi, je féliciterai le vainqueur. Mais je crains que le vainqueur ne soit finalement moi», a-t-il conclu, confiant. «La vérité est que ceux qui sont en face, n’ont pas de candidat pour m’affronter», a-t-il estimé avant  de lancer: «Qui a peur des élections ?» Et ses militants de répondre en chœur: «L’opposition !» Celui qui dirige le pays depuis onze ans a toutefois souligné sa préférence pour le «respect du calendrier électoral, qui fixe au 26 février 2012 le premier tour du scrutin présidentiel». A noter qu’en principe, la Constitution lui interdit de se présenter pour un troisième mandat consécutif, mais Wade juge qu’il en a le droit, la nouvelle loi fondamentale étant entrée en vigueur en 2001, soit un an après son intronisation.

Le dirigeant de 85 ans est forcément revenu sur les grandes manifestations du mois dernier, qui ont fait suite à son projet de réforme constitutionnelle –auquel il a finalement renoncé- puis aux coupures de courant croissantes et paralysantes ces derniers temps. «Il est probable que nous n’ayons pas suffisamment pris le temps d’expliquer en profondeur ce projet de loi», a-t-il déclaré, remettant donc en cause la communication et non le contenu du texte. Car la réforme aurait permis un véritable «partage du pouvoir, un véritable renforcement de la démocratie», a-t-il défendu. De fait, il s’est dit «surpris» d’un tel soulèvement de contestation face à «une idée aussi généreuse». «Nous avons été surpris par les violences des 23 et 27 juin et nous ne pensions nullement que le mécontentement puisse pousser certains de nos compatriotes à user de la violence», a-t-il poursuivi. «Nous avions commis une erreur d’appréciation.» Malgré tout, le chef de l’Etat depuis onze ans a vivement regretté ces vagues insurrectionnelles et les dégâts qu’elles ont causés, des actes «indignes d’une démocratie qui se respecte». «Le 23 juin, nous avons été surpris. Nous sommes maintenant avertis… Je mets en garde tous ceux qui tenteront de déstabiliser  la République, a-t-il prévenu. J’ai décidé en ce sens des instructions fermes pour que force reste à la loi.»

PAS DE PLAN DEDÉVOLUTION MONARCHIQUE

Le texte comprenait notamment deux mesures controversées. D’abord, il prévoyait la création d'un poste de vice-président, considérée comme une manœuvre du président pour pérenniser son fils Karim au pouvoir –sachant qu’il est déjà «super ministre» d'État, de la Coopération et des Transports, et chargé du quart du budget de l'Etat. Mais le père et le fils ne cessent de démentir ces allégations «injustes». «J’exclus totalement de mes préoccupations toute  volonté de  dévolution monarchique du pouvoir», a assuré Abdoulaye, qualifiant ces rumeurs de «médisances». «Je suis arrivé moi-même au pouvoir par les urnes et je n’envisage pas un autre moyen de dévolution du pouvoir», a-t-il insisté. De son coté, Karim, 42 ans, l’a répété lundi: «et je le répèterai aussi longtemps que cela sera nécessaire: c'est une insulte aux Sénégalais d'évoquer un plan de dévolution monarchique. Un tel plan n'a pas été, n'est pas et ne sera jamais dans les intentions du président ou de moi-même», a-t-il affirmé dans une lettre ouverte diffusée par la presse locale. En outre, la réforme prévoyait l’abaissement de 50% à 25% des suffrages le seuil nécessaire pour être élu président dès le premier tour de scrutin. Face à une opposition morcelée, cette modification aurait pu favoriser la réélection d’Abdoulaye Wade. Une interprétation rejetée par ce dernier. «Les 25% ont toujours existé au Sénégal, a-t-il fait valoir, comme le rapporte Sud Online.  (Léopold Sédar) Senghor [le premier président de la république du Sénégal de 1960 à1980, ndlr] l’avait institué pour éviter que l’abstention ne prive le Sénégal d’un président, a-t-il rappelé. Ces 25% ont été supprimés en 1998 et remplacés par les 50%.»

Quant aux délestages qui ont provoqué l’ire de la population, l’octogénaire a dit avoir le problème en main. «Le diagnostic a révélé que la Senelec (Société nationale d'électricité du Sénégal, ndlr) est gravement malade… Nous en sommes à la thérapie», a-t-il imagé. Il a promis que des centrales neuves seront achetées et installées d’ici trois ans. En attendant, la location de centrales va permettre une amélioration sensible de la fourniture d’électricité, précise Sudonline.sn. «Dès septembre prochain, les coupures de courant ne seront plus qu’en mauvais souvenir», a-t-il auguré. Le Sénégal, qui passe pour l'un des pays les plus stables et démocratiques d'Afrique de l'Ouest, est l'une des rares nations de cette région à n'avoir connu aucun coup d'Etat militaire depuis l'indépendance en 1960.



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