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Justice

Le pouvoir de la justice vu sous l’angle des évènements de 1962

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Le pouvoir de la justice vu sous l’angle des évènements de 1962

La crise politique qui opposa en 1962 les deux têtes de l’exécutif sénégalais Léopold Sédar Senghor et Mamadou Dia doit être reliée en partie à la présomption selon laquelle la Justice constituerait un pouvoir, a analysé le magistrat à la retraite Ousmane Camara.

‘’C’est présomptueux de dire que la justice est un pouvoir. C’est cela d’ailleurs qui avait conduit au drame de 1962 parce que le pouvoir ne semblait être détenu ni par Mamadou Dia ni par Senghor. Or, la nature ayant horreur du vide, il fallait qu’on sache lequel des deux l’incarnait’’, a-t-il déclaré dans une interview publiée par l’édition du week-end du quotidien privé Enquête.

La crise politique de décembre 1962, intervenue au Sénégal dans un cadre institutionnel caractérisé par un régime parlementaire bicéphale, était l’aboutissement d’une lutte à mort pour le pouvoir, avec comme protagonistes deux camps opposés incarnés par Léopold Sédar Senghor et Mamadou Dia, respectivement président de la République et président du Conseil (Premier ministre).

Le président du Conseil était désigné par le président de la République puis investi par majorité absolue par des députés ayant une légitimité directe. Il jouait un rôle de Premier ministre, détenait l’essentiel des pouvoirs, déterminait et conduisait à sa guise, la politique du gouvernement.

Les troubles politiques nés de l’adversité entre Senghor et Dia, deux anciens compagnons de lutte, avaient fatalement abouti par l’arrestation du second nommé, ainsi que 4 de ses compagnons, son jugement, sa condamnation à la déportation perpétuelle dans une enceinte fortifiée à Kédougou et sa libération en 1974. Il avait été ensuite amnistié par décret présidentiel en avril 1976. .

Les dissensions entre les deux hommes concernaient surtout sur la manière de conduire les affaires de l’État. Une opposition qui a viré en conflit ouvert. Et le 17 décembre 1962, le gouvernement est renversé par une motion de censure votée par l’Assemblée nationale. Ce qui marqua le début d’une crise politique.

‘’Au Sénégal, on a pompeusement dit que la magistrature était un pouvoir au même titre que l’exécutif et le législatif (…). En réalité, de pouvoir, il n’y en a qu’un, c’est celui que le peuple a donné au président de la République. Il existe maintenant des différences de fonction’’, a analysé Ousmane Camara, ancien président de la Cour suprême (1985-1991).

Selon le magistrat, procureur général lors du procès de Mamadou Dia, ‘’il s’agit de se demander comment la justice cohabite avec le pouvoir exécutif. C’est le rapport entre celui qui a le pouvoir et celui qui tranche sur le destin d’autrui, le juge’’.

‘’Certes, le président de la République est puissant, mais il est incapable de condamner quelqu’un. Celui qui condamne, c’est plutôt le juge. Les rapports entre ces deux ont toujours été, à travers les siècles, des rapports contrastés’’, fait-il observer.

Il évoque à l’appui de son analyse le procès de Dia au cours duquel celui-ci est accusé de tentative de coup d’Etat et soutient que Mamadou Dia ‘’a eu le tort d’avoir perdu’’. ‘’Alors en tant que procureur général, je ne pouvais retenir aucune peine contre lui’’.

‘’Si Mamadou Dia avait triomphé de Senghor, c’est ce dernier qu’on aurait traîné devant la Haute cour de justice en égrenant les fautes qu’il a commises’’, se refusant en tant que professionnel du droit de ‘’dire que l’un est blanc comme neige et que l’autre est un renégat’’.

‘’Il y a des moments où l’on vous demande ce que vous voulez. C’est au juge de savoir ce qu’il veut. Entre ces deux positions consistant à dire que le juge doit faire ce que le gouvernement veut ou en brave Sénégalais refuser tout, la réalité est beaucoup plus nuancée’’, a-t-il souligné.

‘’Les magistrats ne siègent pas au ciel, mais dans une réalité qui est là et qui est constante. Il faut tenir compte de tout cela et ne pas dire que c’est un pouvoir’’, tranche le magistrat, admis à faire valoir ses droits à la retraite en 2002, après avoir été 40 ans durant au service de son pays.



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