
Accusé
d’avoir fait assassiner Yves Lambelin et d’autres Français au Novotel,
le Général Dogbo Blé rejette les aveux qu’on lui attribue.
Qu’il
est facile de désinformer et de diffamer sur une affaire quand on a
pris le soin d’emmurer vivantes les personnes qu’on pointe du doigt sans
qu’ils puissent s’expliquer ! Depuis son arrestation et sa mise au
secret à Korhogo, dans des conditions absolument inhumaines, le général
Bruno Dogbo Blé, ancien patron de la Garde républicaine, est dépeint
comme le diable incarné et accusé de tous les péchés d’Israël par les
autorités judiciaires ivoiriennes. Qui instrumentalisent, pour les
besoins de la cause, la presse ivoirienne proche du clan Ouattara, et
les médias hexagonaux.
Ainsi, Le Figaro, quotidien proche de la droite française et de Nicolas Sarkozy,dans son édition du 22 juin dernier, livre un «scoop». Dogbo Blé «aurait partiellement reconnu sa responsabilité dans l’enlèvement», même s’il a nié «toute volonté d’assassinat». Le Figaro, qui croit tenir ce qu’il appelle un «demi-aveu», tente de «mouiller» Gbagbo. «Véritable
cheville ouvrière de la défense d'Abidjan, Dogbo Blé n'obéissait qu'à
Laurent Gbagbo. L'ancien président est-il impliqué ? Selon des
diplomates, l'entourage de Laurent Gbagbo réfute vivement», écrit le journal.
«Je n’ai jamais rien avoué. Je n’ai jamais affirmé avoir participé à l’enlèvement des Français»,
a martelé le général Dogbo Blé à des personnes qui l’ont rencontré
récemment. Très clairement, selon lui, les autorités ivoiriennes ont
enfumé les responsables politiques français, qui ont eux-mêmes induit en
erreur leur presse.
Dogbo Blé a également fait des confidences à ses
interlocuteurs, qui donnent une idée de la manière dont le régime
Ouattara procède pour essayer de «fabriquer» des charges contre ses adversaires.
Torturé à l’hôtel du Golf puis à Korhogo, Bruno Dogbo Blé a été mis «en isolement»
pendant un mois et demi. Puis il a été amené dans une forêt de Korhogo,
les yeux bandés, le pistolet sur la tempe, à la merci de ses geôliers.
Objectif ? Lui extorquer des aveux sur des faits imaginaires pouvant
faire couler les personnalités politiques qui effraient le régime. «Simone Gbagbo a avoué les escadrons de la mort. Avoue aussi, et tu auras la vie sauve» : tel est le marché qui lui a été proposé. «Si elle a avoué, c’est son problème, je ne suis au courant de rien», a maintenu le général, protestant de son honneur d’officier d’une «armée qui se respecte».
Ce
témoignage est capital parce qu’il éclaire d’une manière crue les
méthodes utilisées par le pouvoir pour monter des dossiers à charge
contre certaines personnes. Dogbo Blé n’a pas craqué, mais d’autres
l’ont peut-être fait. Et il ne faudrait pas être surpris qu’ils se
rétractent lors des audiences publiques, s’ils sont toujours vivants. «Les confidences des protagonistes sont souvent incomplètes et contradictoires», écrit Le Figaro. On pourrait ajouter : «Comme toujours dans des procès-verbaux bidonnés »...
Selon
nos sources, le général Dogbo Blé et les militaires incarcérés avec
lui, dont le commandant Norbert Dua Kouass, aide de camp de Gbagbo, ont
le moral haut. Même s’ils n’ont pas le moindre contact avec l’homme pour
qui ils ont combattu jusqu’au bout. «Ils sont fiers d’être là où ils sont, fiers d’avoir lutté pour défendre la constitution et la souveraineté de leur pays», rapporte une de nos sources.
Focal. Comment Dogbo Blé a été arrêté
Dogbo
Blé n’a pas été pris chez sa maîtresse, mais dans un appartement qui
lui servait de planque au Plateau, et où il se trouvait avec un de ses
hommes de confiance, que les FRCI ont pisté pour pouvoir remonter
jusqu’à lui. C’est ce qui ressort de ses confidences. Quelques jours
avant, il avait pris le soin de présenter sa reddition, non pas aux
forces de Ouattara, mais au numéro deux militaire de l’ONUCI, un
Ghanéen, et à un officier de la force Licorne. Les vrais adversaires, en
quelque sorte… Ses interlocuteurs lui ont proposé l’exil. Ce qu’il a
refusé. «Il n’y a pas de raison. J’ai lutté pour la souveraineté de mon pays», a-t-il dit.
Il
a donc quitté le Palais dans sa voiture, et s’est retranché dans un
appartement discret du Plateau, le temps que les choses se calment. Deux
jours après, les FRCI mettent en joue un membre de sa garde rapprochée,
qui les conduit jusqu’à son patron. Il est en pyjama parce qu’il se dit
qu’il est là pour un bon bout de temps, et n’est donc pas pressé de se
mettre en tenue de ville. Il est «cueilli» dans sa chambre, alors qu’il est en train de déjeuner.
On
le conduit au Golf dans la brutalité. Mais on lui donne tout de même
une chambre. Le lendemain de son arrivée, il déjeune avec Guillaume
Soro. Par la suite, on vient le sortir de la chambre qui lui avait été
attribuée et on l’installe au secret. Les jours terribles de la torture,
qui se poursuivront à Korhogo, peuvent commencer...
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