
La semaine dernière a été riche en émissions. Sur tous les tableaux, des messages paradoxaux et rivaux. Le Céna-rio catastrophe a eu pour théâtre le Palais et ses lambris dorés. Acteur principal, metteur en scène et réalisateur, Abdoulaye Wade nous a replongés dans la stupeur d’un chef-d’œuvre de littérature complètement fada. Il s’agit de « l’Automne du patriarche » de Gabriel Garcia Marquez. L’auteur colombien raconte les excentricités d’un potentat atroce au crépuscule d’une carrière tout en bottes et en baïonnettes. Un jour, raconte le chef de file du réalisme magique, le dictateur, devenu vieux, eut quelques bisbilles avec un évêque indocile. Dans un accès de rage, il donna un ordre ferme à ses nettoyeurs : balancez le par-delà la cordillère des Andes ! Quand le prêtre se retrouva au fond d’un précipice, le crâne en bouillie, le tyran se sentit bien seul. Que va-t-il devenir sans son opposant fétiche ? C’était quand même son sparring-partner favori dans le jeu des invectives et de la diatribe verbale. L’affaire devint une question de vie ou de mort : il veut pouvoir compter et ses coups et ses sous. Alors, il aboya un contre-ordre immédiat : ramenez-moi le prêtre en vie et en entier ! Toutes proportions gardées, le président Abdoulaye Wade semble souffrir du même syndrome de solitude. Après avoir poussé l’ex-président de la Cena, Moustapha Touré, à la démission, il le réclame désormais. Au palais, au plus vite.
Le désir ardemment exprimé du chef de l’Etat a accouché de la plus grande incongruité cinématographique. Un film muet à l’ère de l’Iphone 3G et du Ipad. Jamais dans le Sénégal indépendant des autorités d’une grande institution n’ont été congédiées du palais pour des raisons aussi farfelues. Le précédent est dangereux. Des administrateurs de carrière se sont crus dans un film d’horreur. Vous vous rendez compte ? La Commission électorale nationale autonome, son président et ses membres, chassés comme des malpropres ! Pourquoi ? Parce que son Excellence veut voir l’ancien président de la Cena, le juge Moustapha Touré, présenter le rapport 2009 de l’institution. Passe donc le sacro-saint principe de la continuité de l’administration. Selon la presse, le président de la République était venu avec son savon, son gourdin et une ferme intention : régler ses comptes avec le juge Moustapha Touré. En forçant sur les détails, on atteint le niveau robinet bagarre de quartier. Les deux hommes ne se saluaient plus, ne se parlaient plus. Et alors ?
Le jour de la Korité, Me Wade a envoyé d’autres messages urbi et orbi. L’opposition appelée au dialogue devra soustraire de son discours toute allusion à la troisième candidature du chef de l’Etat sortant. C’est un faux débat. Les mourides n’ont pas à s’inquiéter du retard dans le démarrage des travaux de la mosquée de Massalikoul Djinaan. C’était un simple faux départ. Pour les autres discussions de politique politicienne, le moment n’est pas encore venu de distinguer le faux du vrai dans l’entendement du président. L’ambiguïté se cultive en politique et nul ne peut en faire le reproche à ce maître de jeu de la feinte et de l’esquive. Par contre, la manière de gérer l’argent du contribuable sénégalais, notre argent, nous donne des soucis monumentaux. Le déroulement et le dénouement de l’affaire Global Voice en administre la preuve comme on administre une gifle. Chaque jour apporte son lot de révélations les unes plus retentissantes que les autres.
Le journal «La Gazette», dans sa publication de la semaine dernière, nous apprend l’existence d’un compte séquestre pour payer des commissions à de hautes autorités de l’Etat. Vrai ou faux, on attend de l’Agence de régulation des télécommunications et postes une mise au point. Ces messieurs n’ont pas le droit de prendre les Sénégalais pour quantité négligeable et leurs responsabilités pour secondaires. Ils ont engagé le pays, ses institutions et ses avoirs. Notre droit est de savoir. Leur devoir est d’informer le plus promptement possible. Déjà, l’Agence de régulation des marchés publics a suspendu le marché entre Global Voice et l’Artp. On applaudit. Bravo ! Demain, l’Armp aura même raison de casser le deal. L’Artp n’est jamais passée par la procédure normale de l’appel d’offres. Mais on attendait du président de la République la même rigueur. Vous pensez certainement que nous n’aurions pas voulu avoir un chef d’Etat rigoureux, qui ne signe jamais un décret sans s’entourer du minimum de garanties ? Vous vous trompez peuchère.
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