Si les étudiants en Licence 3 de géographie ne comptent que sur des menaces de s’immoler pour avoir gain de cause, ils peuvent se raviser. Les universitaires ne comptent pas transiger sur leurs positions. La délibération est définitive et irrévocable. Il n’y aura plus de repêchage. Elles ont tenu à expliquer le nœud du problème, tout en sortant des chiffres qui ne plaident guère en faveur des grévistes.
«Les délibérations sont secrètes et définitives. Les textes ont été respectés.» Le recteur de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) a été on ne peut plus clair hier. Lors d’une conférence de presse, le Pr Saliou Ndiaye a fait comprendre de manière péremptoire qu’il n’existe pas de solution autre, pour les étudiants en Licence 3 de géographie, que de reprendre la Licence pour compléter le nombre de crédits nécessaires à l’obtention de ce diplôme. Il s’agit d’une décision souveraine de la commission pédagogique qui ne saurait être influencée ni par le recteur encore moins le doyen ou une quelconque autre autorité.
En fait depuis quelques jours, des étudiants en Licence 3 de géographie sont en grève de la faim pour demander un repêchage. Face à ce qu’ils appellent l’absence de réaction des autorités, ils menacent de s’immoler dans les jours à venir si rien n’est fait. Pour le recteur, il n’y a certes pas une logique de bras de fer, mais il n’est pas question non plus d’ultimatum à lancer à l’autorité. «Nulle part dans le monde des résultats n’ont été changés après délibération, parce qu’il y a une pression des recalés», se veut clair le patron de l’Ucad.
«Ce qu’ils exigent est une faveur et non un droit»
Pourtant, Saliou Ndiaye semble sensible à la situation des étudiants. Il dit lui-même les avoir rencontrés à deux reprises sous plusieurs casquettes. «Je suis allé les voir en tant que père de famille parce que je comprends ce que ressentent leurs familles dans ces circonstances. J’y étais également en tant que parent d’élève, en tant qu’éducateur et en tant qu’autorité.» A chaque fois et sous toutes ces casquettes, le recteur dit leur avoir expliqué que ce qu’ils exigent est une faveur et non un droit. Sans compter les initiatives des autres collègues.
Les étudiants, eux, restent sur leur position. Il n’est pas question de reprendre la Licence quitte à sacrifier leur vie. Sans entrer dans les détails, le recteur qui ne souhaite pas qu’on en arrive à cet extrémisme a fait savoir qu’il dispose de services qui feront le nécessaire à ce niveau. «Tout ce que je peux faire, c’est de leur trouver des conditions dans lesquelles ils seront en sécurité, mais je ne peux malheureusement pas les forcer à manger.»
En vérité, ce qu’il y a c’est que les étudiants sont en porte-à-faux avec les règles. La question est de savoir s’ils agissent dans l’ignorance ou consciemment. Dans tous les cas, le recteur les invite à aller vers les textes pour avoir la bonne information. Ce qui se passe, c’est qu’en 2010, quand il fallait basculer dans le système Licence-master-doctorat (Lmd), la Faculté des lettres s’est retirée en conclave à Saly pour étudier les modalités d’application. C’est ainsi qu’il a été décidé, pour les départements qui fonctionnent avec les Unités de valeurs (Uv) de les convertir en Unité d’enseignement (Ue). Le système Lmd demandant 60 crédits, les autorités décident de prendre 60 divisés par le nombre d’Uv pour chaque niveau. Pour le cas de la licence I et III, il y a 7 Uv. 60 divisés par 7 égale 8,57. Les enseignants décident de l’arrondir à 9. Une Unité d’enseignement (Ue) validée vaut donc 9 crédits. La Licence II a 6 Uv. Par conséquent, une Ue vaut 10 crédits, car c’est 60 divisés par 6 Uv.
«13 parmi les grévistes ont fait 8 ans en Licence»
Après tous les repêchages possibles, ces étudiants en question se retrouvent avec 6 Uv validées sur les 7 demandées. Ce qui, multiplié par 9, fait un total de 54 crédits. Il leur reste donc une Ue à valider. Avec l’actuel système, si c’était dans le cas d’un passage en classe supérieur, ils seraient des «enjambistes», c’est-à-dire qu’ils seraient admis en classe supérieure, mais avec des crédits à rembourser, puisque qu’ils ont dépassé les 42 crédits d’admission sous condition. Mais en réalité, il s’agit ici de l’obtention d’un diplôme. Il n’est pas possible donc de devoir des crédits. Il faut les 60 sur 60. Autrement, on reprend la Licence 3. Surtout que, clarifie le doyen de la Faculté des lettres, Amadou Abdoul Sow, «même dans l’ancien système, il n’y avait pas de passage de la Licence en Master sous condition». Il déclare : «Durant toute ma vie, je ne pensais pas avoir un jour des revendications pareilles. Retournons à nos valeurs.»
Afin de prouver la légitimité des décisions prises, les responsables sortent un tableau plus qu’édifiant. 94% des 316 étudiants concernés ont une note inférieure à 8 sur l’Uv manquante. 77% ont déjà été repêchés sur une Uv. Il s’y ajoute que 13 parmi eux ont fait 8 ans à l’université, 33 ont fait 7 ans, 75 ont fait 6 ans, 76 ont fait 5 ans, 53 ont fait 4 ans et enfin 64 sont ceux qui ont fait les trois années normales du cycle.
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