
En matière de prévention, il ne suffit pas d’avoir raison, encore faut-il convaincre. Et ce qui se joue actuellement autour du cancer du col de l’utérus en est une parfaite illustration.
Ce cancer est le dixième cancer le plus fréquent chez la femme en France, responsable d’environ 1 100 décès par an, et c’est l’un des seuls cancers pour lesquels le pronostic se dégrade en France, avec un taux de survie à cinq ans en diminution. De quoi s’inquiéter, mais surtout de quoi se lancer dans de fortes stratégies de prévention, d’autant qu’il y a des outils solides et efficaces. Entre d’un côté le vaccin, mais surtout le frottis cervico-utérin qui permet de détecter précocement la présence ou non de cellules précancéreuses. Un procédé que les autorités médicales souhaitent généraliser d'ici 2018.
Ce lundi, qui marque le début de la semaine européenne de prévention et de dépistage du cancer du col de l’utérus, commence le compte à rebours pour aller au plus vite vers un dépistage généralisé. Car, il n’y a aucun doute. «Le cancer du col de l’utérus peut être évité dans neuf cas sur dix grâce au frottis de dépistage», insiste l’Institut national du cancer (Inca). Depuis les années 1980, la systématisation de cet examen a ainsi conduit à une baisse importante du nombre de nouveaux cancers du col de l’utérus. «En 2015, ce nombre avoisinait les 3 000 mais avec une augmentation des cancers graves, entraînant une diminution de la survie à cinq ans», explique l’Inca. Selon Frédéric Debels, responsable du dépistage à l’Inca, la généralisation du dépistage organisé, avec des relances périodiques envoyées aux femmes concernées, permettrait de réduire de 30% les nouveaux cas et les décès par cancer du col.
«Kits d'auto-prélévement»
Et pourtant, aujourd'hui encore près d’une femme sur deux ne se fait pas régulièrement dépister après 50 ans, parce qu’elle est en général moins bien suivie sur le plan gynécologique. Et plus généralement, 40% de femmes âgées de 25 à 65 ans n’effectuent pas de frottis de dépistage à titre individuel tous les trois ans. Le taux de dépistage est également faible chez les femmes vivant dans des milieux défavorisés, en situation ou atteintes de maladies de longue durée. Bref, peut mieux faire. Et pour ceux qui doutent encore de ce dépistage, 13 départements ont mis en place en 2010 une expérimentation de dépistage généralisé. «Résultats très encourageants», pour Nathalie Beltzer, de l’agence Santé publique-France, co-auteure de l’évaluation publiée, ce lundi, dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH). L’expérimentation a permis d’augmenter de 12 points le taux de dépistage des femmes âgées de 25 à 65 ans.
Tout serait donc simple : installer au plus vite ce dépistage généralisé, et cela tous les trois ans. Dans un éditorial du BEH, les responsables de l’agence Santé publique-France détaillent l’intérêt du dépistage organisé par invitation-relance des femmes non spontanément participantes. «Cette stratégie permet de réduire l’incidence du cancer du col de 13 à 26% selon les scénarios, et se traduit par des gains d’espérance de vie. Dans un essai réalisé en Indre-et-Loire, les femmes n’ayant pas répondu à une invitation à réaliser un frottis reçoivent à domicile un kit d’auto-prélèvement. Et, alors que les simples courriers de relance n’ont pas d’efficacité, l’envoi de ce kit permet de doubler la participation au dépistage (22,5% versus 11,7%»). En même temps, les auteurs de ces travaux rappellent que «les variables associées à une faible participation au dépistage sont l’âge (plus on est âgée, moins on se fait dépister), le fait de vivre dans une zone identifiée comme défavorisée, d’être en ALD (affection de longue durée) ou bénéficiaire de la CMUC (Couverture maladie universelle complémentaire), et de résider dans une région de faible densité médicale. Les résultats de cette étude doivent amener à développer des stratégies adaptées pour atteindre ces femmes. C’est l’un des enjeux qui fait la spécificité de ce dépistage organisé.»
Pour l’heure, le cahier des charges du programme de dépistage organisé sera publié fin 2017. «Le déploiement se fera de manière progressive : une étape de transition marquera la montée en charge progressive en 2017 et la généralisation du programme est prévue en 2018.» Enfin, lâcheront certains.
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