
Le déferrement au parquet des directeurs de publication de L’Observateur et du journal Le Quotidien, respectivement Alioune Badara Fall et Mohamed Guèye, ainsi que du journaliste de « L'Observateur », Mamadou Seck, a poussé le Synpics à monter au créneau. Porte-parole de ladite organisation, Aly Fall l’assimile à une intimidation qu’il dit dénoncer de vive voix.
Seneweb : Quel commentaire faites-vous après les arrestations de journalistes par la Section de Recherches pour des informations publiées dans la presse ?
Aly Fall : Nous sommes naturellement surpris par ces arrestations qui ressemblent fort à de l’intimidation. Pourtant, qui connait l’histoire de la presse dans ce pays, sait que ce ne sont pas des convocations tous azimuts à la police ou à la gendarmerie qui vont nous faire fléchir dans notre volonté d’informer les Sénégalais. Les lecteurs, auditeurs et téléspectateurs ont droit à une information exacte, pluraliste et impartiale. Et nous nous donnerons toujours les moyens de faire ce travail. Bien sûr, nous insistons également sur le professionnalisme qui doit nous animer tous, parce que nous ne sommes pas au dessus des lois du pays. Ce que les gens doivent savoir, c’est qu’il n’y a pas un seul journaliste qui écrit avec comme seul objectif de désinformer. Il s’avère qu’il a mal informé, c’est qu’il s’est trompé de bonne foi. Encore que rien ne dit dans ces articles qui nous ont valu des convocations, que les confrères du journal Le Quotidien, de L’Observateur et de l’EnQuête n’ont pas bien informé. Au contraire d’ailleurs, nous sommes convaincus qu’ils ont fait correctement leur travail, parce que c’est ce que les lecteurs attendent de nous.
N’avez-vous pas le sentiment que le régime veut faire peur aux journalistes à travers ces convocations ?
En tout cas, si c’est une volonté de nous faire peur qui les anime, ils perdent leur temps. Si nous journalistes, nous n’avons pas les moyens d’aller dénicher ce qui est caché aux Sénégalais, pour le rendre public, nous devons changer de métier. Parce que tant que nous ferons ce métier, nous ne nous lasserons jamais d’aller au fond des choses. Si maintenant, ces gens qui sont là pensent qu’en procédant à des arrestations et à des convocations à tout rompre, ils nous font peur, c’est parce qu’ils n’ont rien compris. Cette liberté de la presse est garantie par notre Constitution, qui veille à ce que les journalistes exercent librement le métier. Ils peuvent essayer de la remettre en cause, mais ils sauront que la terreur et la répression ne passeront pas !
Et que compte faire le Synpics ?
Nous sommes très sereins, parce que nous nous disons que nous avons survécu au régime de Wade. Nous n’avons pas peur et nous savons que les confrères n’ont pas peur. Nous restons aux aguets et nous apporterons tout notre soutien à tous les confrères intimidés. Nous soutenons sans réserve les confrères de L’Obs, du Quotidien et de l’EnQuête. D’ailleurs, on s’étonne que le régime se détourne des questions de l’heure, pour s’attarder sur des choses pour lesquelles, il n’aura jamais raison sur nous.
Pour vous, c’est quoi justement les questions de l’heure ?
Aujourd’hui, les urgences pour les journalistes, c’est le Code de la presse ou encore la nouvelle Convention collective des journalistes. Même si ce régime n’a aucune vision pour la presse, il est clair que la résolution de ces deux dossiers aurait pu lui sauver la face. La précarité dont souffrent les journalistes est plus urgente. Et il doit y apporter des solutions. On aurait compris si c’était des missions d’inspection qui étaient envoyées dans les Rédactions pour voir les conditions de travail des journalistes. C’est ça son rôle ! Aujourd’hui, les journalistes souffrent dans leur chair. Il y en a qui restent des mois sans salaire. Ils n’ont aucune couverture sociale, leur avenir est hypothéqué et ils travaillent dans l’incertitude totale. Ces journalistes n’ont aucun soutien de l’Etat, alors que c’est ça qui devrait être l’urgence. Vous avez récemment entendu des journalistes de Top FM licenciés parce qu’ils réclamaient leur salaire. On a brandi l’argument de «faute lourde» pour se débarrasser d’eux, parce qu’ils demandaient leur argent. Ces jeunes, pères de famille, pour la plupart, n’ont aucun soutien de l’Etat du Sénégal. De la même façon, dans la Rédaction de Stades, les journalistes sont considérés comme des esclaves. Ils travaillent tous les jours sans aucun répit, leur salaire est coupé s’ils arrivent en retard au travail. Ils subissent des représailles présentement parce qu’ils ont exprimé leur envie de mettre sur pied une section Synpics dans la maison. Voilà des questions de droits des travailleurs qui doivent mobiliser l’Etat et ses services. Sinon tout le reste, c’est de la diversion.
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