
C’est parti pour des semaines de procès, des mois de tapage médiatique autour de la personne de Karim Wade, et des biens supposés mal acquis. Une "théâtralisation" à outrance d’un dossier judiciaire dans lequel, instrumentalisation, victimisation, impertinence et sensationnel rivalisent d’ardeur, dans une pollution sonore et visuelle.
On se demande combien de temps va durer ce cirque gigantesque auquel l’opinion va devoir assister, contrainte. Entre temps, impossible de parler d’autre chose, des sujets de société brûlants : tout organe de presse pris dans le piège du pouvoir essaiera de vous convaincre, que la priorité du moment reste et demeure le procès du fils de l’ancien chef de l’Etat.
Celui que cette même presse, qui l’avait déjà voué aux gémonies, dépeint aujourd’hui, dans une analyse simpliste, comme un futur président de la République. Son mérite ? D’avoir effectué la case «Prison», l’étape qui devrait le mener vers les marches du «Palais», aussi farfelue que puisse paraître l’idée.
Mais pour le moment, c’est le Palais de justice qui en fait la vedette, donnant le la aux organes de presse, dans un agenda mûrement réfléchi et dont l’issue repose sur une volonté manifeste de monopoliser le débat politique ; un monopole qui exclut et occulte toutes voix discordantes de celles définies par le pouvoir et ses adversaires de façade...
Dans leurs manœuvres de diversion et de manipulation de l’opinion, nos gouvernants, leurs soutiens ou leurs détracteurs dans une certaine mesure, tentent de convaincre les Sénégalais, que Wade-fils est et reste le problème du Sénégal, la préoccupation majeure qui vaille l’ouverture des JT et JP, la Une des quotidiens du jour et le sujet des palabres. Que, durant tout le procès, le pays devrait retenir son souffle. Machine à propagande enclenchée : comme si, du maintien de Karim en prison et non de sa libération éventuelle, devrait dépendre l’avenir ‘radieux’ que le chef de l’Etat et son équipe promettent à nos finances publiques, qui hument, déjà, la brise de l’émergence...
Oui, la priorité est ailleurs et il faut refuser, que ce procès occulte les préoccupations sérieuses d’un pays toujours plongé dans l’immobilisme, et dont l’économie peine à décoller depuis deux ans, du fait d’une absence de leadership assumé à la tête de l’Etat, et d’une feuille de route claire dans l’esprit de ceux qui ont en charge la destinée des populations.
Alors qu’on parle de Karim Wade et de son procès, on ne parle pas des problèmes du Sénégal, on les occulte à dessein, dans un clin d’œil à une opinion internationale qu’il faut convaincre, que sous nos tropiques, les criminels économiques connus et tus, au pouvoir comme dans l’opposition, appartiennent tous au même camp, au même bloc, au même orchestre quoiqu’ils n’en aient pas l’apparence. Ils se parlent, se rencontrent et accordent leur violon, leur arrive-t-il aussi de chanter faux, en public…
Quid de ces millions de francs engloutis dans des honoraires d’avocats, dans des voyages à l’étranger au profit de commissions rogatoires multiples et aux résultats décevants ?
Placer le procès Karim Wade au cœur des débats revient à divertir l’opinion, à occulter les carences manifestes d’un pouvoir qui assoiffe des populations ou «usagés» auxquels on peine, grandement, à assurer une fourniture correcte et régulière de l’eau et de l’électricité. Parler du procès Karim Wade, c’est aussi nier la faille de l’école sénégalaise, de tout son système éducatif, de ses formateurs pas à la hauteur, de cette université qui ne forme plus, en passe de devenir un mouroir pour étudiants en détresse.
Enfin, ce n’est pas parce que Karim Wade sera jugé, condamné ou même pendu à un croc de boucher que le Trésor public et ses caisses se porteront mieux, que l'économie sénégalaise décollera, que les Sénégalais connaîtront l’émergence tant chantonnée par l’orchestre gouvernemental.
Que Karim Wade soit déclaré innocent ou coupable, condamné ou blanchi, en fin de compte, on n’en a rien à cirer ! La priorité, à nous tous, devrait être ailleurs !
Momar Mbaye
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