
Après plus de deux ans de relations heurtées suite à une série de violences entre ressortissants mauritaniens et sénégalais et des relations diplomatiques rompues, les deux pays limitrophes ont décidé à nouveau de coopérer. Le 23 avril 1992, leurs relations diplomatiques, rompues en août 1989, sont reprises. Chacun des deux pays rouvrant son ambassade.La rupture de leurs relations diplomatiques est consécutive à des violences inouïes entre les deux pays déclenchées en avril 1989.Le 9 avril 1989, à Diawara (localité du Sénégal oriental), des bergers peulhs mauritaniens et des paysans soninké Sénégalais ont eu un accrochage. Selon des informations relatées par la presse sénégalaise en son temps, l'armée mauritanienne est intervenue. Deux Sénégalais sont tués, plusieurs grièvement blessés et une douzaine retenus en otages. Le ministre de l'Intérieur de l'époque, André Sonko, déclare dans les colonnes du journal "Le Soleil" du 17 avril 1989 que "trop c'est trop". Une commission d'enquête parlementaire est mise en place pour enquêter sur les conditions de l'accrochage. Ce qui n'a pas plu aux autorités mauritaniennes. L'escalade va crescendo. Du 21 au 24 avril 1989, en guise de représailles, des commerçants maures blancs ont vu leurs boutiques pillées, certains brûlés vifs. Le chiffre officiel est de 60 victimes. En fin avril, des centaines de Sénégalais sont tués ou mutilés à Nouakchott et dans plusieurs autres villes mauritaniennes. Ceci en réponse aux exactions de Dakar. Pendant plusieurs jours, on assiste dans les deux pays à des chasses à l'homme racistes. “A Dakar et à Nouakchott, les scènes de pillage ont été accompagnées d'actes de sauvagerie inouïe : corps mutilés, têtes coupées, femmes éventrées, enfant égorgés etc”, rapporte “Le Soleil” dans son édition du 24 avril 1989.Les autorités des deux pays réagissent et essaient de sauver les ressortissants des deux pays. Les Mauritaniens restés au Sénégal sont ainsi récupérés et parqués au Cices (Foire de Dakar), sous bonne garde de la gendarmerie et de l'armée, en attendant leur rapatriement. Les sénégalais de la Mauritanie sont également regroupés dans des zones exiguës, attendant parfois plusieurs jours avant d'être rapatriées. Un pont aérien offert par l'Algérie et le Maroc est ouvert. L’état d’urgence et le couvre-feu sont instaurés sur la région de Dakar afin de contenir une foule surexcitée. C’est ainsi que 70.000 Sénégalais arrivent à Dakar en l'espace de quelques jours alors que 170.000 Mauritaniens quittent le Sénégal pour rentrer.
Rupture diplomatique
Le 21 août 1989, les relations diplomatiques entre les deux pays sont rompues. Le Sénégal et la Mauritanie entretiennent des rapports froids et heurtés. La Mauritanie réclame la restitution des biens de ses ressortissants et le décompte officiel des morts mauritaniens tandis qu'Abdou Diouf désire que soit traité devant une commission d'enquête internationale la question de la frontière. Les deux pays envoient des troupes à la frontière et le 6 janvier 1990, des tirs entre militaires sont échangés. La tension est d'autant plus extrême que certains rapatriés Sénégalais, établis dans la région du fleuve, tentent au péril de leur vie de rejoindre la Mauritanie pour récupérer les biens dont ils ont été dépossédés.
Dans un discours radio-télédiffusé, prononcé en français, le président Mauritanien de l'époque, Ould Taya accuse le Sénégal d'être l'unique responsable de la situation. Abdou Diouf lui apporte une réplique cinglante : “La Mauritanie a toujours bafoué les droits les plus élémentaires de l'homme et de la dignité humaine. La presse (accusée d'avoir envenimé la situation) exerce librement, sans entraves, son métier, ce qui est impensable en Mauritanie". Abdou Diouf met, toutefois, en garde Ould Taya : “Il faudrait être fou dans le monde actuel pour rechercher la guerre, surtout quand on est un pays sous-développé et de surcroît sahélien”(voir le Soleil, 23 août 1989).
Finalement, les Présidents Abdou Diouf et Ould Taya se rencontrent le 18 juillet 1991, en Guinée-Bissau. Pour montrer sa bonne foi, le président Abdou Diouf renonce à réclamer une rectification frontalière et évite la guerre grâce à cette réconciliation. Les relations diplomatiques seront rétablies le 23 avril 1992 et la frontière sénégalo-mauritanienne rouverte le 2 mai 1992. Depuis, les deux pays vivent en parfaite harmonie.
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