
L’ancienne biscuiterie de Médina a servi d’espace d’échange sur l’utilisation des langues nationales. C’était, hier, au tour d’un café littéraire dans le cadre du Fesman 3.
Une critique littéraire des ouvrages écrits en langues nationales, c’est le ‘café’ servi hier à la Biscuiterie de Médina. Pour animer le débat, le professeur de littérature comparée, Maïssa Bèye. Les échanges se sont faits en français et en wolof parce que le conférencier est convaincu que ‘tout ce qui s’écrit en langues étrangères peut se dire en langues nationales’. Il est pour l’usage des langues locales dans ces genres de rencontres. L’orateur souhaite que ‘le bilinguisme stratégique’ soit instauré parce qu’il croit qu’il est possible de présenter et de discuter des livres dans nos propres langues si on parvient à les écrire dans ces mêmes langues.
Maïssa Bèye soutient qu’il suffit juste d’avoir une politique linguistique ‘cohérente’ et une maîtrise des langues nationales. L’apprentissage, dès le bas âge et dans les établissements scolaires, est le moyen le plus rapide pour parvenir à cet objectif, selon cet inspecteur d’éducation. Il tient à souligner qu’on ne fait jamais ‘la promotion’ d’une langue. Elle se pratique et s’impose par ‘son dynamisme’. Mais Maïssa Bèye estime tout de même qu’il faudra que nos langues soient plus présentes sur le Net et s’adaptent aux Nouvelles technologies de l’information et de la communication (Tic) et à la mondialisation.
Le professeur de littérature juge que toutes les langues au monde se valent. Il trouve qu’il n’y a pas de ‘conflits linguistiques’ au Sénégal parce que les langues parlées dans notre pays sont ‘complémentaires’. Cependant, il conseille d’insister sur les langues étrangères comme le français et l’anglais même s’il est d’accord qu’il faut ‘s’enraciner’ d’abord avant de s’ouvrir pour un ‘multilinguisme’. Une idée que partage l’écrivain Cheik Aliou Ndao qui est d’avis qu’il faut donner ‘la même importance’ à toutes les langues et essayer d’établir ‘un équilibre’ quand on traduit des œuvres en d’autres langues pour ‘atteindre les autres publics’.
Spécialiste de littérature orale, Ibrahima Wane est d’avis qu’il faut surtout réfléchir sur ‘la création littéraire’. Pour lui, ce n’est pas parce qu’on écrit en langues nationales qu’il faut être ‘moins rigoureux’. Il trouve que c’est un outil de travail qu’il faut maîtriser et que ça demande ‘plus d’exigence’ puisqu’on parle déjà langues. La linguistique Arama Fall, de son côté, défend la nécessité d’écrire dans nos langues nationales et qu’il faut surtout un travail ‘conscient et volontaire’ pour faire évoluer ces langues afin d’être à l’ère du progrès ‘scientifique et informatique’.
Mots croisés avec
Cheikh Aliou Ndao, ECRIVAIN : ‘Il faut écrire en langues nationales ‘
Est-il facile d’écrire dans les langues nationales ?
Avec la colonisation, les Blancs ont ancré dans l’esprit de beaucoup d’Africains qu’il est très difficile de faire des ouvrages dans les langues africaines. Les Blancs quand ils vous colonisent, ils essayent de tout vous enlever à commencer par la tradition mais surtout la langue locale. Maintenant on pense qu’on n’est pas capable de produire des livres écrits en langues nationales ou africaines. Personnellement, je pense qu’il est plus difficile d’écrire un livre dans une langue étrangère que dans nos propres langues. Et plus on écrit et lit dans nos langues plus on aura l’habitude d’écrire en langues nationales.
Pourquoi encouragez-vous tant les écritures en langues locales?
C’est important et même essentiel pour la vie de ces langues. Il faut écrire en langues nationales par respect même à ces langues. Les gens s’étonnent quand ils vous voient écrire dans les langues nationales mais notre public cible c’est d’abord le public de notre pays. Maintenant on peut faire une traduction de nos œuvres pour atteindre les autres publics.
L’adage dit qui traduit trahit…
C’est qu’on ne fait pas une traduction de mot à mot. On traduit juste l’esprit du texte. Shakespeare par exemple, il écrivait en anglais et ses textes étaient pourtant joués en français à Paris. Seulement il y a des règles qu’il faut respecter, mais on constate que les gens font souvent ce qu’ils veulent surtout au niveau des médias. Il faut donc faire des efforts à ce niveau.
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