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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
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Sénégalaisement vôtre

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Sénégalaisement vôtre

La grandeur d’un peuple ne se mesure pas seulement à ce qu’il est capable d’accomplir, elle s’appréhende aussi par ce qu’il est capable d’empêcher.

Il y a des moments importants dans notre nation gravés en lettres d’or dans l’imaginaire collectif tels que l’épopée de 2002 des lions de la Téranga en coupe d’Afrique et à la coupe du monde, le soulèvement spontané du 23 Juin qui a vu la force de la volonté populaire faire reculer un régime arrogant et entêté, ou encore l’alternance politique pacifique du 19 Mars 2000 qui avait été perçue comme une véritable leçon de démocratie pour le monde.
Dans l’arène politique, dans la production intellectuelle, dans le discours populaire, le 19 Mars et le 23 Juin sont des repères auxquels on fait souvent référence.

De mon point de vue le 21 Janvier 2017 doit être hissé et installé sur le piédestal des dates marquantes de notre histoire.

Les plus grandes victoires sont sans doute celles pour lesquelles on n’a pas eu à mener bataille. Ce  soir du 21 janvier, la crise en Gambie a connu son épilogue avec l’exil sans effusion de sang du Président Yaya JAMEH. 
Une guerre n’est jamais petite et si son issue est prévisible, ses effets collatéraux ne le sont pas ; ni dans l’intensité ni dans le temps.

La pire de toutes, c’est la guerre civile. Nul ennemi ne saurait autant vous faire mal que celui qui vous connait. Une intervention militaire en Gambie aurait été un conflit fratricide. Bien que le Sénégal seul, sans aucun soutien extérieur soit beaucoup plus fort, dans le contexte sécuritaire de la sous région et du monde, cela aurait été bien hasardeux. C’est d’une petite braise que sont issus les feux de brousse. Rien ne peut garantir qu’une flamme qu’on allume ne deviendra pas un gigantesque incendie ; surtout dans une zone ou l’herbe a séché et où le vent souffle fort. 

En termes de spéculations pures, le volte face de Yaya JAMEH a quelque peu coïncidé avec la résolution de l’ONU portée par le Sénégal concernant la Palestine qui a fait monter Israël sur ses grands chevaux. Si nous avions foncé tête baissée pour déloger JAMEH, qui dit qu’en guise de représailles, Israël ne l’aurait pas soutenu, nous compliquant sérieusement la tâche ?

Tout prés de chez nous, notre voisin le Mali est aux prises avec des groupes armés aux ramifications extérieures. Qu’est ce qui nous garantit qu’un Yaya JAMEH dos au mur ne les aurait pas invité à le rejoindre, internationalisant le conflit et nous entraînant dans une spirale de violence incontrôlée ?

Ce qui par contre est une certitude, c’est qu’une intervention militaire solitaire en Gambie aurait eu pour conséquence indirecte de raviver le conflit casamançais qui s’emble s’estomper depuis quelques années. 

Gambia has decided, Sénégal did it

Ce sont à ces moments précis qu’on est fier d’être sénégalais, qu’on a la conscience aigüe que nous sommes plus qu’un peuple ordinaire. Nous avons certes nos travers mais notre histoire démontre qu’à des moments clés nous savons transcender les difficultés, faire preuve de discernement et de lucidité pour surmonter les obstacles les plus grands et être à la hauteur des situations les plus exigeantes. Nous le disons souvent entre nous, plus le péril est grand, plus le Sénégal sait se montrer à son avantage.

Le traitement et l’issue de la crise en Gambie inspirent soulagement et fierté. Le Sénégal a merveilleusement bien joué le coup. Il a préparé la guerre et donné une chance à la paix jusqu’au bout.

Les forces de défense de sécurité étaient en alerte et dans le secret de leurs conclaves avaient fini d’affiner leur stratégie. Les zones frontalières à la Gambie, depuis la région jusqu’au quartier en passant par le département et la commune, étaient préparées avec le concours de l’administration territoriale aux périls humanitaires, sanitaires et sécuritaires que n’aurait manqué d’engendrer cette guerre. 

Sur le plan diplomatique, comme l’a rappelé le Professeur Abdoulaye BATHILY lors de sa conférence de presse du 23 Janvier 2017, ce fut une véritable prouesse que d’arriver à fédérer les différentes instances internationales que sont la CEDEAO, l’Union africaine et même l’ONU. Ce sont, en outre, de très hautes autorités du continent qui se sont personnellement investies en se rendant plusieurs fois à Banjul en l’occurrence la Présidente du Libéria, le Président du Nigéria et l’ancien président du Ghana. Il ne faut pas s’y tromper la capitale diplomatique de la crise gambienne, c’était Dakar. Ce n’est pas un hasard si le Président de la Mauritanie lors des négociations y a fait escale pour s’entretenir avec son homologue sénégalais en provenance de Banjul avant de rentrer.

Sur le plan militaire, si la supériorité du Sénégal sur la Gambie ne fait pas l’ombre d’un doute, notre pays a su après s’être entouré des garanties de légitimité juridique et institutionnelle, engager les forces de la CEDEAO et agir sous son couvert. A partir de ce moment la supériorité de la coalition n’était pas seulement nette, elle était devenue disproportionnée. Abondance de forces ne nuit pas !

Yaya JAMEH a été perdu par le Sénégal. Il était une menace géostratégiqueau cœur même de notre nation. Notre Chef d’Etat lui a consacré sa première visite officielle. Cela ne l’a pas empêché d’avoir à son endroit, ainsi qu’à celui de ses prédécesseurs, des propos très irrévérencieux. Son pays a servi de base arrière à la rébellion casamançaise avec son concours actif et sert de canal au pillage de nos ressources forestières frauduleusement acheminées en Chine. Nous n’avons pas pour autant attenté à sa vie ou cherché à renverser son régime, répondant au contraire à ses offenses par le mépris du silence et refusant de contrevenir à la souveraineté et au droit à l’autodétermination d’un peuple frère. Face à cette position délibérément pacifique, il a dû penser que nous étions faibles. Il ne se doutait pas de ce qui arriverait : quand la Gambie en a eu assez de Yaya, c’est le Sénégal qui a tourné  page à JA..MEH. 

Il s’était voulu Professeur El Hadj Docteur Yahya Abdoul Aziz Jemus Junkung JAMEH. Sans une seule goutte de sang versée, le Sénégal lui a arraché ses titres usurpés et a montré à la face du monde ce qu’il est devenu le jour où il s’est vu grand : Yaya Nding (en manding Yaya le petit).

Cela dit, en tant que peuple, notre remarquable aptitude, à faire les bons choix aux carrefours de l’histoire est l’indice d’un potentiel qui paradoxalement nous accable. Qu’en avons-nous réellement fait ? Le génie de l’Homo Senegalensis fait des éclairs par à-coups et saillies alors qu’il devrait rayonner comme un soleil triomphant. Il nous faut franchir un cap et faire de l’excellence une exigence permanente et constante. Ce qui, reconnaissons le, est bien loin d’être le cas…
 



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