
Le cycle socialiste a été si long… Les modes de gouvernance qui en ont résulté sont si profondément ancrés dans le subconscient de nos libéraux actuels que leurs pratiques politiques en sont littéralement viciées. Me Wade était obsédé par Senghor et Diouf.
À sa suite, le Président Sall est pris en étau entre Niasse et Tanor. Cette permanence du même sous des airs de «Sopi» et de «Yokute» empêche nos gouvernants d’identifier les vrais problèmes, de poser les vraies questions et de travailler à les résoudre de façon concertée et solidaire, sur la durée. Car dans la vie des sociétés humaines, «tant que les problèmes reçoivent leurs solutions du jeu normal des institutions et de l’application honnête des règles disposées à cet effet, il n’y a pas lieu de parler de violence.»
Or, aujourd’hui dans notre pays, une violence inutile, excessive et dérisoire, informe jusqu’à l’hystérie le discours de nos gouvernants. «Désormais, quiconque diffusera de fausses nouvelles (sur le pétrole et le gaz ?), s’exposera aux rigueurs de la loi pénale.» Dans sa rigueur implacable, cette menace du Premier ministre a quelque chose de rigoureusement renversant. En effet, si c’est maintenant seulement que nos autorités se décident à appliquer la loi dans toute sa rigueur, c’est que cela n’a pas toujours été le cas, que tout ce qui ne s’origine pas de l’Etat est nécessairement faux, que la vérité ne peut provenir que du gouvernement.
Dans cette logique manichéenne, le Premier ministre a raison de dire que «la recherche pétrolière est un métier et il faut être du métier pour en parler.» Soit, mais les ressources issues du pétrole appartiennent à tous, y compris aux non initiés. De plus, nos gouvernants semblent ne s’être découvert cette volonté légaliste et justicière qu’avec les fortes senteurs du pétrole. Et leur discours ne s’adresse qu’aux impertinents qui s’aventurent sur ce terrain d‘initiés. «Dans un souci de transparence, une task-force sera mise en place afin de mettre en ligne tout ce qui a trait aux contrats pétroliers…»
En parlant ainsi, au futur, de questions présentes et pressantes, il s’engage dans une impasse. En promettant qu’ils ne «laisseront plus prospérer les propos diffamatoires, les allégations sans fondement et les attaques malveillantes», M. Dionne affirme tout à la fois, une volonté de puissance et un aveu d’impuissance. En effet, dans une République organisée, de telles banalités ne susciteraient pas un tel déploiement médiatique, une telle fureur répressive. Il aurait suffi, le cas échéant, de saisir la justice, pour que force reste à la loi : en toute justice.
De plus, c’est précisément parce que le pétrole est une affaire d’initiés, mais dont les ressources sont publiques et non privées, que le devoir des gouvernants est de nous fournir la bonne information, pour éviter la «diffusion de fausses nouvelles». Quant au journaliste Adama Gaye, ses déclarations sur cette affaire sont aussi prétentieuses, nombrilistes et dérisoires par excès les unes que les autres.
Son propos sent la morgue, le chantage et la récupération. En vérité, s’il sait tout ce qu’il prétend savoir, d’avoir attendu si longtemps, après que la clameur du pétrole s’est élevée, c’est totalement décalé et mal venu de nous vouloir tenir un discours messianique, de façon si péremptoire et solitaire. De fait, haut perché sur sa suffisance, M. Gaye ne sait pas si bien dire quand il affirme n’être ni Sonko ni Mbaye.
Eux ne se gargarisent pas d’avoir «aidé Macky Sall à signer son premier contrat pétrolier, ou d’être l’ami d’on ne sait quel prince…» Ils se contentent de poser les bonnes questions sur la manière dont notre pétrole est exploité. Finalement, Adama Gaye nous aura plus renseignés sur ses fréquentations et sa personnalité que sur les vraies questions soulevées par Sonko et Mbaye, et sur lesquelles les Sénégalais s’interrogent encore. Pourtant, a quelque chose malheur est bon.
En effet, par ses sorties, il nous aura fourni un renseignement précieux pour son ego et dérisoire par rapport à nos attentes : journaliste comme Aliou Sall qu’il accable, M. Gaye hante les milieux où l’on négocie et s’enrichit avec le pétrole des peuples. Autre renseignement précieux : nos autorités n’aiment pas les questions de fond sur nos richesses enfouies dans les fonds marins… Pour celui-ci comme pour ceux-là, c’est proprement du «wax feegn».
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