
Mimi Touré ou plutôt Mimi Tchatcher. Pareille nomination ne saurait surprendre. Classée parmi les femmes les plus influentes de l’année 2012, la Garde des Sceaux promue Premier ministre, a un défi immense à relever. Sur ses épaules repose l’espoir d’un président qui a montré ses limites.
De la réussite ou de l’échec de Mimi Tchatcher dépend la survie politique d’un président, la réélection de Macky Sall.Un «homme» du sérail. Le nouveau Premier ministre du Sénégal détiendrait en main tous les atouts pour réussir la mission qui lui est confiée. Mission qui consiste d’abord, à réconcilier le pouvoir avec le peuple, et faire renaître l’espoir afin de pouvoir relever, progressivement, les défis du développement. Ce qui passe par une relance nécessaire de la croissance, étant donné qu’il lui faudra asseoir une politique à même de redonner espoir aux investisseurs et de calmer les ardeurs d’une bonne frange de la population qui attend toujours, avec insistance, une baisse des prix des denrées. Des consommateurs à qui il faudra tenir un langage de vérité, et se résoudre à les convaincre, une bonne fois, qu’une baisse des prix, telle que promise par l’équipe de campagne de Macky Sall, ensuite réitérée par le gouvernement Abdoul Mbaye, n’était que pure démagogie, impossible à réaliser dans le contexte actuel de la crise. Un engagement aussi risible que la formation d’un gouvernement promis à vingt-cinq membres…
Il s’agira donc pour Mimi Tchatcher de convaincre, d’asseoir une politique de l’emploi adéquate, et tout dépendra de sa capacité à mettre en place une équipe de collaborateurs à l’expertise avérée, aux compétences solides et au profil irréprochable. Hélas ! Casting est raté dès le départ, encore une fois, le choix de certains collaborateurs s’avère problématique, motivé pour certains, par cette éternelle logique de partage du gâteau. Nos gouvernements se gavent comme des porcs, chaque remaniement est l'occasion de prendre du poids.Mais Mimi Tchatcher a plus ou moins ses chances, elle qui va devoir accélérer la cadence, appuyer sur l’accélérateur des réformes. De tout l’entourage présidentiel, elle traduirait le mieux la vision du chef de l’Etat dont elle a été et reste un très proche collaborateur. Faudrait-il toutefois souligner, qu’en terme de vision, Macky Sall peine à convaincre, lui dont le parcours reste problématique, si ce ne sont des circonstances particulières qui l’ont amené à exercer les fonctions de chef de l’Etat.
Un président dont sait d’où il vient, mais pour lequel il est difficile de dire avec précision, où il va, où il compte mener le navire ; un capitaine qui sait décrypter les signaux mais qui traîne les pieds quand il s’agit d’agir, de poser des actes concrets. Cette valse lente a fini par indisposer tout un régime, qui revendique à lui seul, un an et demi de cafouillages «mackyllés» d’un amateurisme propre à un novice, un début de « sept-quennat » couronné de décisions impopulaires, enfin, un mandat jalonné de tâtonnements, de nominations politiciennes, de choix politiques ni adéquats ni opportuns, empreints de cacophonie à tous les niveaux du fait d’un usage excessif de la communication.Près de deux ans à la tête du pays, on tourne en rond. Macky se cherche encore et Sall n’est pas près de se retrouver, lui qui doit pouvoir indiquer aux populations la voie qui mène au fameux «yokkuté».
A ce président de transition dont l’arrivée au pouvoir relève d’un accident de l’histoire, il faudra laisser des empreintes dans les annales de l’histoire. Mais le temps joue en défaveur de ce président qui nous ressemble trop, et qui en fin de compte ne serait que le reflet de nos carences propres, le prolongement de nos insuffisances, donc loin de présenter le meilleur profil que ce pays puisse produire.Si tout n’est pas perdu, difficile de dire que l’espoir est permis devant une demande sociale allant crescendo, les urgences se multipliant. Il fallait donc changer de cap : démettre le gouvernement, à défaut de pouvoir décharger un président en cours de mandat. Un président dont on se demande bien s'il ira au bout de son mandat, s'il arrivera à tenir devant le poids des urgences et pressions de tous bords.
Car ce n’est pas Abdoul Mbaye ou Mimi Tchatcher qui pose problème, mais Macky lui-même, leader d’une formation politique embryonnaire, sans base politique solide, sans cadre ni expertise avérée, une coquille quasi-vide d’où ne pouvait ressortir un profil meilleur que Mimi Tchatcher, sans doute la crème de ce que compte en compétences, ce parti. Porte-parole officieuse du gouvernement sortant, devenue l’une des figures politiques les plus admirées et les plus détestées à la fois, l’ex-militante des droits de l’homme n’en est pas moins une «dame de fer» à qui le département de la Justice a servi de promotion, d’ascension politique.
Traque des biens mal acquis, affaire Habré, la voilà propulsée sur le devant de la scène. Mais Mimi devra surtout assurer, prendre ses marques et rassurer. Calmer les colères, apaiser les frustrations, un exercice périlleux d’autant qu’il lui faudra démontrer sa capacité réelle à asseoir un consensus autour de l’essentiel. A défaut, minces seront ses chances de survie face aux démons qui ont évincé de la Primature, un prédécesseur devenu la tête de Turc des hommes politiques de tous bord, pouvoir et opposition confondus. Elle est la clé de la réussite ou de l’échec d'un président sur qui plane le spectre du mandat unique, le syndrome Sarkozy. Dorénavant, dites, Mimi Tchatcher !
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