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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Chronique

'' Bob Denard and Co '' par Aliou Ndiaye

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'' Bob Denard and Co '' par Aliou Ndiaye

Bob Denard peut frémir de plaisir. De sa tombe, le célèbre mercenaire français doit goûter le recyclage réussi de ses lointains disciples. Sa bouillante légion étrangère a une façon nouvelle de descendre sur Kolwezy. Désormais, les méthodes sont bien plus softs, les tenues bien plus soignées et les légionnaires beaucoup moins débonnaires. La tête a remplacé le poignet. Le diplôme a succédé à la mitraillette. Et l'invasion barbare se fait par la persuasion et la bravade. Signe d'une reconversion professionnelle parvenue : les nouveaux mercenaires s'essaient à la communication, au cosmétique et au faux-semblant. On ne tire plus sur le tas. On vise les intellectuels qui bougent. La coalition des partis souteneurs du candidat Abdoulaye Wade a sorti le chéquier pour s'attacher les services de ces vautours intercontinentaux. Bob Denard and Co vient d'ouvrir boutique. Dans le cadre douillet du Méridien Président, la compagnie pavoise et toise le «who’s who» local. Un conseil de guerre en Afrique, en plein hiver, ce sont des vacances tous frais payés. Qui n'en redemanderait pas ? Thème de ce forum télévisé : la candidature du président de la République pour un troisième mandat. L'initiative n'est pas nouvelle. Elle est une reproduction sous d'autres formes des entreprises mercenaires des soleils des indépendances. Le temps où des soldats de fortune français retournaient les situations les plus improbables au profit de l'ancienne métropole. Le néocolonialisme a son nouveau Houphouët Boigny. Il s'appelle Abdoulaye Wade.
 
Le séminaire du Fal est une erreur historique grave. Les partisans du chef de l'Etat sortant se trompent de pays et d'époque. Le Sénégal a dépassé le temps où les bacheliers se comptaient sur le bout des doigts. En cette époque où tout universitaire passait pour un savant, les discours ampoulés et la faconde avaient une valeur politique indéniable. Aujourd'hui, la séduction a changé de paramètres et les séducteurs de profils. Dans chaque famille sénégalaise, il y a, au moins, deux messieurs capables des mêmes pseudo-exploits intellectuels achetés par le Fal. Cette importation va peser sur notre balance électorale. C'est la preuve à la fois d'un mépris et d'une méprise. Le peuple du Sénégal est suffisamment instruit du débat sur la recevabilité de la candidature de Abdoulaye Wade à la Présidence de la République. Le chef de l'Etat avait lui-même fermé le ban en mars 2007. Son aveu est la reine de toutes les preuves. Dans son esprit comme dans celui des rédacteurs de notre charte fondamentale, la carrière politique de l'enfant de Kébémer devait s'achever le 26 février 2012. L'argument de la non-rétroactivité de la loi est une redite. Des avocats proches du pouvoir l'avaient brandi à l'aube de la polémique avant de le ranger dans les tiroirs. Ce qui se passe n'est plus un débat. Le Fal n'est pas intéressé par la vérité. Il cherche à vaincre sans avoir raison. C'est une attitude de type coloniale comme enseignée par Cheikh Hamidou Kane dans L'Aventure ambiguë.
 
Le défi pour notre peuple est historique. Le moment est venu de mettre un terme à la licence et à la désinvolture des hommes politiques. Depuis l'indépendance, cette élite s'arroge le droit d'user et d'abuser de la loi au profit d'intérêts partisans étroits. Pour eux, tout est politique politicienne. Car au-delà des gesticulations juridiques, la candidature de Abdoulaye Wade pose un problème éthique. Deux mandats suffisent à un démocrate pour servir son pays et se retirer. En France, même si pendant longtemps la limitation du mandat présidentiel n'était pas inscrite dans la Constitution, les moeurs politiques locales l'avaient adoptée et imposée. On voit donc un universitaire français venir défendre chez nous une idée impensable chez lui. Son état d'esprit est clair. Monsieur Mons et ses amis pensent comme Jacques Chirac. Pour eux, la démocratie est un luxe pour les pays africains. Nous sommes formatés pour courber l'échine et souffrir les extravagances de quelques dictateurs parfois sanguinaires. Aucun d'entre eux n'aurait misé sa crédibilité intellectuelle en défendant une candidature à la Maison blanche d'un homme de 90 ans. L'éthique a pour eux une variation géographique scandaleuse. Bob Denard est mort. C'est une faute de croire en sa résurrection sous d'autres formes.


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